Le verdict du procès des attentats du 13 novembre 2015 est attendu avec impatience par les survivants de la tuerie et les familles de victimes. Parmi elles, Jean-Bernard et Claudine Arruebo ont fait le déplacement. Leur fille Anne-Laure, était à la terrasse de La Belle Équipe, rue de Charonne, lorsque les terroristes lui ont volé la vie. Malgré la douleur omniprésente, cette famille raconte le procès.
« Nous ne sommes ni soulagés ni stressés de voir s’achever ce procès. Nous attendons simplement le verdict. Nous savions depuis le début que c’était une étape inéluctable quant au traitement que l’on ferait aux terroristes qui ont frappé ce jour-là. Il s’agit juste, pour nous, de laisser la justice française faire son travail.
Nous ne sommes pas magistrats et donc ce n’est pas à nous de demander quoique ce soit. En revanche nous espérons évidemment, de tout cœur, que le jugement rendu pour l’assassin de notre fille soit le plus dur possible.
Dix mois, c’est très long. En ce qui nous concerne, ils ont été rythmés par notre vie à Quint-Fonsegrives et une vie, non pas parisienne au sens où l’entend d’habitude, mais tout simplement judiciaire. Nous logions régulièrement chez la sœur d’Anne-Laure, car nous sommes devenus grands-parents. Notre petite fille de 17 mois, dont le deuxième prénom est Anne-Laure, a amené un rayon de soleil dans notre vie de famille. Pour le reste, tout n’est qu’épreuve.
D’abord, il y a eu le début où l’on a dû supporter neuf heures de lecture de l’accusation liée au décès de notre fille. C’était éprouvant. Un autre point marquant a été la partie dédiée aux témoignages. Bien sûr, il y a eu le mien. Je n’aurais jamais pu imaginer évoquer un jour, à la barre, l’assassinat de notre fille. Mais il y a eu aussi des quantités de témoignages bouleversants de familles de victimes mais aussi de survivants de l’attaque. Un autre moment fort a été celui où cette femme, qui depuis se fait appeler Soraya, a témoigné. Elle a permis d’éviter d’autres attentats et de neutraliser Abdelhamid Abaaoud. Il est un de ceux qui ont tiré à la kalashnikov sur les personnes, dont Anne-Laure, qui se trouvaient à la Belle Équipe. Cette dame a dû changer de nom. Elle est aujourd’hui protégée, sous surveillance en permanence. Elle a eu beaucoup de courage.
Nous avons tissé des liens avec des survivants de l’attaque, bien entendu. Ce sont pour certains des liens étroits. Nous avons surtout échangé avec des survivants du bar La Belle Équipe où Anne-Laure se trouvait en compagnie de sa collègue et amie. Contrairement à ce qu’on dit, il n’y a pas de jalousie envers celles et ceux qui ont survécu. Ces gens sont très malheureux car ils doivent supporter un poids énorme : avoir vécu l’horreur. Leurs témoignages sont poignants, bouleversants.
L’accusé Abdeslam, demande pardon. Cet homme…vous comprendrez que j’ai du mal à prononcer son nom… demande, en effet, pardon. Je pose juste la question : face à de tels actes, comment peut-on pardonner ? C’est totalement impardonnable et inexcusable. L’accusé dit vouloir faire preuve d’humanité ? Il faut avoir une solide carapace lorsqu’on entend ces propos et notamment l’entendre dire qu’il n’a rien fait alors qu’il participait à tout ! Il ne se rend pas compte du mal qu’il a engendré. En plus, son dernier mot lorsqu’on évoque sa participation à un assassinat, est « injustice ». Je préfère ne pas commenter…
Il faudra reprendre le quotidien et continuer avec les souvenirs même si depuis le 13 novembre 2015, en termes de souvenirs, c’est « feuille blanche ». Mais nous avancerons pour Anne-Laure en lui apportant des fleurs, encore et toujours. En participant, aussi, aux cérémonies d’hommage. Nous œuvrerons également au sein de notre association « 13 Onze 15 ». Et cet automne, à Toulouse, nous serons à l’inauguration d’une rue près du Stade Toulousain. Ce sera un bel hommage à Anne-Laure qui était fan de rugby. Même si nous le savons, rien, pas même ce procès, ne nous rendra notre fille. »