Eco-activistes radicaux : la galerie des petits bouffons

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Depuis quelques mois, des activistes d’un nouveau genre multiplient les coups d’éclat pour faire parler d’eux et, accessoirement, pour sauver le monde. Narcissiques et inconséquents, ils sont le visage d’un militantisme qu’on ne saurait qualifier d’écologique.

Par La rédaction de Valeurs actuelles

Publié le 11 novembre 2022 à 18h29

Deux activistes de ‘Just Stop Oil’, englués au mur de la National Gallery de Londres après avoir jeté de la soupe sur les « Tournesols » de van Gogh.Just Stop Oil

Alizée, la madone au filet

​Greta Thunberg ayant choisi de retourner à l’université, l’activisme écologique se cherche de nouvelles têtes d’affiche pour continuer à incarner le combat. Alizée sera-t-elle ce nouveau visage ? Au premier abord, la jeune femme de 23 ans ne correspond pas au portrait-robot du néojusticier vert : style BCBG, cheveux non décolorés, collier chic autour du cou. Dans son cas, la vérité est plutôt à l’intérieur, où l’on trouve une farouche volonté de renverser la table et une bonne dose de ressentiment à l’égard des générations précédentes, comme l’ont laissé deviner ses quelques interventions médiatiques.

​Restait à trouver l’action. Ce fut en juin, lors de la demi-finale du tournoi de Roland-Garros opposant Casper Ruud à Marin Cilic. L’éco-activiste s’accroche le cou au filet du court Philippe-Chatrier. Agenouillée, front fier, position christique, elle arbore un T-shirt aux accents collapsologistes : « We have 1 028 days left » (“Il nous reste 1 028 jours”). L’image fait le tour du monde, son collectif Dernière Rénovation (lire l’encadré) engrange des centaines d’adhésions. Le tour est réussi. Dans la presse, Alizée se décrit comme « juste une fille normale qui fait de son mieux pour avoir un avenir viable ». À l’image de ses contemporaines, elle mange bio, trie ses déchets, prône la décroissance et souffre d’éco-anxiété. Le profil parfait pour être érigée en icône de la cause climatique par Libération et Télérama.

Victor, le coupeur de Flûte

​Vendredi 28 octobre, à l’Opéra Bastille à Paris. Les spectateurs assistent à une représentation de la Flûte enchantée de Mozart quand, soudain, aux alentours de 21 h 30, un militant écologiste de Dernière Rénovation interrompt l’acte II en montant sur scène. Affublé d’un T-shirt blanc sur lequel on lit « We have 879 days left » (“Il nous reste 879 jours”), Victor s’attache par le cou à une échelle du décor avec un antivol de vélo.

« Je ne suis pas là par plaisir ! » , crie le jeune homme avant que le rideau ne tombe. Celui qui voulait “interpeller” s’est surtout fait huer par toute la salle. Après vingt heures de garde à vue, il tente de se justifier. « Personne n’entre en résistance civile par plaisir, argumente-t-il. J’aurais préféré continuer à regarder la Flûte enchantée comme le reste des spectateurs mais il faut faire comprendre au public que cette beauté n’existera pas dans un monde où les gens se battent pour leur survie. » Victor a 25 ans, il se décrit comme un « citoyen engagé » qui veut « prévenir les gens », mais « pas avec des chiffres ». L’émotion contre la raison : la recette est éprouvée.

Phoebe, l’arroseuse des Tournesols

​Dans sa bio Twitter, trois pronoms : « they, she, he » (“ils, elle, il”). Le ton est donné : Phoebe est plurielle. En guise de photo de profil, un selfie, lunettes de soleil vintage sur le nez, cheveux roses, tatouages au bras… Un profil d’adolescent·e en crise. Il est vrai qu’elle n’a que 21 ans. La vie à Wimbledon avec ses deux frères étant trop paisible, Phoebe a tout fait pour s’émanciper du carcan familial : alimentation végane, combat écolo, manifestations LGBT.

​Bientôt les revendications à la mode ne lui suffisent plus et les études d’anthropologie sociale à l’université de Manchester se révèlent ennuyeuses. En août 2022, Phoebe Plummer rejoint Just Stop Oil (lire l’encadré) ; l’association lui offre l’occasion d’assouvir ses instincts de rébellion. En moins de trois mois, l’activiste cumule six arrestations pour militantisme “écologique” et manque de peu la prison ferme pour avoir vandalisé des stations-service. Le 14 octobre, elle tient son coup d’éclat. La militante pénètre dans la National Gallery de Londres et arrose les Tournesols de Van Gogh de soupe à la tomate. En moins de cinq minutes, l’idéal d’absolu de l’adolescente est atteint. Elle fait la une de l’actualité et Libération l’élève au rang des héros.

Jérôme, le comédien de l’A6

​Vendredi 28 encore, les Parisiens partent en vacances. Ils n’iront pas bien loin. Vers 18 heures, en face d’eux, au beau milieu de l’A6, dix militants se sont assis en tailleur et bloquent le trafic. Impossible de forcer le passage, c’est l’embouteillage. Les quarts d’heure filent. La tension monte. Les Klaxon hurlent. Des automobilistes excédés finissent par sortir de leur véhicule. « J’ai un avion à prendre dans dix minutes, dégagez ! », lance une vacancière. Elle tente de déloger un perturbateur mais rien n’y fait : il se laisse traîner sur l’asphalte avant de mollement reprendre sa place.

​À quelques mètres de là, un certain Jérôme se confie. L’activiste de 26 ans est venu pour crier son éco-anxiété. Il sanglote. « Aujourd’hui, c’est 2 200 personnes qui meurent. C’est l’équivalent de 5 fois mon village natal », balbutie celui qui se dit « comédien ». Ce sit-in – c’est le nom que se donne le parasitage immobile – marque l’entame de la troisième campagne de « résistancecivile » menée par Dernière Rénovation, collectif décidément très actif. Le projet s’étalera sur six semaines : les vacanciers pourraient bien retrouver leurs amis sur le trajet du retour.

Louis McKechnie, le beatnik au poteau

​On connaissait les streakers, ces gens qui s’élancent nus sur la pelouse lors d’une rencontre de football ou de rugby, en général sans raison autre que celle d’un pari perdu. Avec Louis McKechnie, l’exhibitionnisme relève d’un autre genre, moins comique, moins gratuit. Mi-mars, l’activiste anglais, âgé de 21 ans, s’est attaché le cou à un poteau de but lors d’un match de football opposant Everton à Newcastle.

​Avec ses cheveux longs et ses lunettes style aviateur, Louis a tout du jeune des années post-68. Mais l’époque n’est plus à la fête : elle a troqué la jouissance illimitée pour l’angoisse écologique. Sur le T-shirt orange de ce beatnik 2.0, on peut lire : « WeHaveNoFuture : Just Stop Oil » (“Nous n’avons pas d’avenir : non au pétrole”). Avant Just Stop Oil, cet ex-étudiant en ingénierie a multiplié les groupes militants : Extinction Rebellion, Animal Rebellion ou encore Insulate Britain. Mais contrairement aux soixante-huitards, Louis ne s’est pas rebellé contre ses parents : sa maman étudiait le développement durable dans le tiers-monde. Après son geste, il a reçu des « centaines de menaces de mort », lesquelles l’ont contraint à fermer ses comptes sur les réseaux sociaux. « Je n’ai pas besoin qu’ils soient d’accord avec la tactique, juste qu’ils soient d’accord avec le message », a-t-il expliqué. À présent, Louis souhaite passer à la vitesse supérieure : « Nous devons continuer dans l’escalade, être plus radicaux. » Nous voilà prévenus.

Camille Étienne, la VIP

​Figure désormais incontournable de la lutte « pour la justice sociale et climatique », la jeune femme de 24 ans préfère les plateaux de télévision aux jets de soupe sur les peintures des grands maîtres. Passée par Sciences Po Paris, très vite attirée par l’engagement militant, Camille Étienne s’est fait connaître par sa présence sur les réseaux sociaux, en tant que lanceuse d’alerte (autoproclamée) sur les questions climatiques. Sur sa bio Instagram, ces quelques mots : « Déteste Total autant que la coriandre. » La jolie formule !

​Contre le pillage des fonds marins et la surexploitation des énergies fossiles, la militante fait la promotion de la désobéissance civile, mode d’action favori des écolos radicaux. « Ce flanc radical, il est nécessaire », avoue-t-elle (gravement) dans l’émission C ce soir ce 1er novembre, sur France 5. Face à la députée Renaissance Maud Bregeon, elle soutient qu’on n’obtient rien à coup de “s’il vous plaît”. Et de convoquer le sens de l’Histoire, sans quoi rien ne se fait. « Si vous pouvez voter en tant que femme, c’est parce que des femmes avant vous ont désobéi », lance-t-elle à son interlocutrice. Un jour, on les remerciera d’avoir bloqué nos autoroutes.

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