Nous observons depuis les totalitarismes du 20e siècle une exaltation idéologique de la jeunesse qui serait devenue une qualité en soi : jeunesses communistes, jeunesses hitlériennes, tout était fait pour en faire une qualité intrinsèque, dans un but de propagande mais aussi car il est relativement facile de manipuler la jeunesse.
Ce « jeunisme » a perduré jusqu’à nos jours puisque tous les partis ont de sections jeunes dans tout l’éventail politique.
Et pourtant, comme le chantait Brassens avec son solide bon sens : « petit con de la dernière averse ou vieux con des neiges d’antan, le temps ne fait rien à l’affaire ».
On nous a rejoué à fond cette partition avec la nomination de Gabriel Attal comme premier ministre, ce qui lui a valu, en sus de caractéristiques sexuelles revendiquées, les éloges de la totalité des médias.
L’examen de l’Histoire nous montre que cela n’a pourtant rien d’exceptionnel …
Gloires précoces
« Je suis jeune, il est vrai ; mais aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre des années ». Le Cid serait-il de retour dans nos sociétés grisonnantes ?
Après quelques fringants quadragénaires, tels Alexis Tsipras, Matteo Renzi, Justin Trudeau et Emmanuel Macron, voici qu’arrivent à la tête des gouvernements occidentaux des jeunes gens à peine trentenaires comme Sebastian Kurz, chancelier d’Autriche à 31 ans (2017), Daniel Noboa, président de l’Équateur à 35 ans (2023) ou Gabriel Attal, Premier ministre de la République française à 34 ans (2024).
Gardons-nous d’y voir une révolution. Plutôt un retour à la normale ! L’Histoire regorge en effet de talents en herbe et de chefs précoces, à commencer par le plus mythique d’entre tous, Alexandre le Grand. Songeons que le « Conquérant du monde » était déjà mort couvert de gloire à un âge où les susnommés n’avaient encore rien accompli de notable…
La fougue de la jeunesse au pouvoir
Alexandre le Grand (IVème siècle av. J.-C.) demeure la figure emblématique du héros antique qui nourrit encore l’imaginaire occidental. À 30 ans, il parvient à l’acmé de ses ambitions en franchissant l’Indus, après avoir conquis la Perse. Quels autres jeunes prodiges peuvent rivaliser ?
En tournant le regard vers l’Asie, nous rencontrons le Premier empereur chinois. Shi Huangdi (IIIème siècle av. J.-C.), monte sur le trône du royaume Qin à 13 ans, entreprend à 20 ans la conquête des royaumes rivaux de la Chine du nord, et fonde la Chine unifiée que nous connaissons.
Après ces deux immenses conquérants, il faut attendre Moyen Âge pour assister à l’incroyable parcours d’une jeune paysanne illettrée de 17 ans : Jeanne d’Arc. Investie par Dieu d’une mission – sauver la France – , elle redonne confiance au roi Charles VII et prend les armes pour défendre son pays. Brûlée vive à Rouen en 1431, avant l’âge de 20 ans, elle devient une icône planétaire.
Après la Renaissance, la jeunesse de nos illustres personnages brille surtout dans les cours royales. Ainsi, Louis XIV prend en main les rênes du gouvernement à 23 ans et débute le plus long règne personnel de l’Histoire universelle, tandis que Frédéric II devient roi de Prusse à 28 ans et fait de son pays la plus grande puissance d’Europe centrale.
En Angleterre, le roi Georges III fait appel à William Pitt le Jeune (24 ans) pour redresser la situation économique du pays et plus tard combattre Napoléon. En France, la Révolution est prise en main par des jeunes gens tel Saint-Just (26 ans).
Et n’oublions pas un général de légende : Napoléon ! Premier Consul à trente ans, il va en moins de quinze ans bouleverser la France et le monde comme personne avant lui… depuis Alexandre le Grand.
Au début du XXème siècle, la politique semble davantage l’apanage de la vieille génération, la jeunesse etant utilisée aux fins de propagande. Il faut attendre les années 60 pour voir la jeunesse s’affirmer et exprimer ses revendications, mais c’est le XXIe siècle qui marque un retour historique des jeunes au pouvoir, en France comme à l’étranger. En France, Emmanuel Macron est ainsi devenu le plus jeune président de l’histoire de la République française à 39 ans.
La jeunesse n’est donc pas un gage de qualité en soi, c’est la qualité intrinsèque de l’individu, et elle seule, qui devrait tenir lieu de critère.
On peut en dire autant sur la sexualité revendiquée de notre nouveau premier ministre dont on a fait un étendard promotionnel…