Sur sa fiche Wikipédia, Arnaud Rousseau est présenté comme « un homme politique, syndicaliste agricole et agriculteur céréalier français. Il est président de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) depuis 2023 et président du conseil d’administration du groupe industriel et financier Avril depuis 2017 (…) Il est maire du village de Trocy-en-Multien depuis 2014 et vice-président de la Communauté de communes du Pays de l’Ourcq »
Beaucoup de casquettes, donc.
Arrêtons-nous sur « l’agriculteur céréalier français » : « En 2002, il rejoint, aux côtés de son père, l’exploitation céréalière de Seine-et-Marne sur laquelle sont cultivés colza, tournesol, blé, betterave, maïs et légumes de plein champ. Il lui succède en 2012. Il exploite, avec sa femme et quatre salariés, une grande exploitation de près de 700 hectares ». Ce qui fait d’Arnaud Rousseau un gros exploitant agricole, la moyenne des exploitations agricoles françaises tournant autour de 55 hectares.
Prévue dans le traité de Rome, la Politique agricole commune (PAC) voit le jour en 1962 afin de relancer la production alimentaire d’un continent ravagé par la guerre, tout en assurant des revenus satisfaisants aux agriculteurs et des prix convenables aux consommateurs. Représentant aujourd’hui la première dépense de l’Union européenne, elle est désormais très éloignée de ses buts originels, favorisant les grosses exploitations et poussant les petites et moyennes à la ruine.
Arnaud Rousseau, à la tête d’une exploitation qui représente plus de 12 fois la taille moyenne des exploitations françaises, n’est sans doute pas le meilleur représentant des agriculteurs français. D’autant que l‘actuel président de la FNSEA est aussi – et peut-être même surtout – président du conseil d’administration du groupe industriel et financier Avril.
« Avril est un groupe agroindustriel international d’origine française spécialisé dans l’alimentation humaine, l’alimentation animale, l’énergie et la chimie renouvelable. Il a été fondé en 1983 à l’initiative d’une démarche collective du monde agricole français qui s’est structuré en filière pour assurer des débouchés aux productions françaises d’oléagineux (colza, tournesol, soja) et de protéagineux (pois, féverole, lupin). »
« Le groupe Avril opère dans 19 pays et emploie 7 367 salariés. En 2022, son chiffre d’affaires s’élève à 9 milliards d’euros. Il dispose d’un portefeuille de marques leaders (Lesieur et Puget) sur plusieurs marchés notamment en Europe et en Afrique. »
Avril est le 4e groupe agroalimentaire hexagonal. Arnaud Rousseau le préside depuis 2017.
Arnaud Rousseau siège également au conseil d’administration de Saipol, filiale d’Avril et productrice des agrocarburants Diester.
Il préside également la Fédération française des producteurs d’oléagineux et de protéagineux (FOP), filiale de la FNSEA enregistrée comme lobby auprès de la Commission européenne.
Arnaud Rousseau est donc davantage investi dans l’agroalimentaire et l’agrocarburant que dans l’agriculture. Il fait plutôt figure de businessman, se plaçant dans les pas de feu son mentor Xavier Beulin (décédé en 2017), ex-leader de la FNSEA et ancien patron… d’Avril.
On rappellera que les grands groupes de l’agroalimentaire achètent aux agriculteurs leur production à peine au-dessus du coût de revient, étranglant littéralement de nombreuses exploitations :
Le président de la FNSEA ne prévoit pas pour l’instant de renoncer à certains de ses mandats afin éviter les conflits d’intérêts. L’homme d’affaires a cependant indiqué à Mediapart qu’il souhaitait conserver son poste de président d’Avril, mais pourrait démissionner de la FOP.
Arnaud Rousseau soutient par ailleurs le développement des organismes génétiquement modifiés (OGM) et l’exploitation des méga-bassines. Défenseur du statu quo sur les pesticides, il a participé à la manifestation du 8 février 2023 contre l’interdiction des néonicotinoïdes. Ces récentes prises de positions sont d’ailleurs alignées avec les activités de Sofiprotéol, branche financière du groupe Avril. D’après Politis, cette société investit aujourd’hui dans la recherche génétique sur les oléagineux, la sélection génétique animale et la commercialisation de produits phytosanitaires.
Henri Dubost