Omicron : le trou noir du Covid

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TRIBUNE LIBRE de Michel Rosenzweig

– À la fin de mon article du 4 octobre 2021 intitulé Sars-Cov-2 saison 4 : End Game, je terminais mon texte en évoquant le biais cognitif du cygne noir et je concluais en écrivant que « seul un événement d’envergure qui ne relèverait pas du « signe », mais bien d’un « cygne noir » serait de nature à renverser le cours des choses. »

Développée par le statisticien Nassim Nicholas Taleb dans son essai Le Cygne noir, la théorie veut qu’un certain événement imprévisible, qui a une faible probabilité de se dérouler, a de grandes conséquences et un rôle historique déterminant… lorsqu’il se produit. C’est l’expression de la puissance de l’imprévisible.

Le dernier variant de la souche originelle du Sars-Cov-2 de Wuhan baptisé « Omicron » (petit O), après le variant colombien « Mu » mais en évitant « Nu » trop proche du mot anglais « new » et « Xi » (prénom chinois) afin d’éviter toute stigmatisation ethnique et culturelle, ressemble de plus en plus à un trou noir aspirant et broyant tout sur son passage : certitudes, données, convictions, hypothèses, mantras, dogmes, narratifs, clivages, causalités, prévisions, modélisations, etc.closevolume_off

Mais Omicron était prévisible et prévu.

Néanmoins, avec Omicron, des lignes de fractures multiples sillonnent et lézardent chaque jour l’édifice sanitaire et le logiciel épidémiologique dont le mantra est désormais gravé dans la loi de la nouvelle religion politicoscientiste (Gravité, absence de traitement et tout vaccinal).

Le régime sanitaire tyrannique devenu « national vaccinal », tant en France qu’en Belgique, est en voie de promulguer ses premiers statuts des non vaccinés dans son projet de transformation de passe sanitaire en passe vaccinal, qui exclura définitivement de toute vie sociale (et peut-être de toute vie professionnelle, comme en Italie pour les actifs de plus de 50 ans) toute personne ne pouvant exhiber son QR code mis à jour dans les délais requis.

Dans la foulée de cet emballement anxiogène, en Belgique, une citoyenne a introduit le 5 janvier 2022 une action judiciaire en cessation contre l’État belge devant le président du tribunal de première Instance de Bruxelles, visant le Premier ministre Alexander de Croo et le ministre fédéral de la Santé, l’inénarrable Frank Vandenbroucke, pour discrimination et incitation à la discrimination envers la population non vaccinée, voire inciter à la haine contre elle, n’hésitant pas à en faire les responsables de l’échec de la politique sanitaire.

En France, le président Emmanuel Macron déclare lors d’un entretien paru tout récemment dans le Parisien que sa stratégie est « d’emmerder les non-vaccinés » et que ces derniers sont des irresponsables ne méritant plus d’être des citoyens. Ce faisant, ce président prend délibérément le risque de déchaîner la violence encore contenue sous la mince couche de vernis de la civilisation et qui jusqu’ici a bien résisté aux assauts du biopouvoir.

Or, cette violence est toujours d’ordre mimétique selon la théorie de René Girard, une violence essentielle et première qui naît de la relation initiale de l’homme avec son semblable et qui implique une médiation entre un sujet et son désir, celui-ci étant toujours le désir d’un autre, ou de l’autre (triangulation du désir).

Selon la théorie mimétique de Girard, l’homme est animé d’un désir d’appropriation mimétique, le sujet désirant ne désirant pas des objets parce qu’ils seraient désirables en eux-mêmes, mais parce qu’autrui, en les désirant, les rend désirables, car l’homme n’existe vraiment que pour autant qu’il imite son semblable. « Le désir est essentiellement mimétique », il se calque sur un désir modèle et il élit le même objet que ce modèle (La violence et le sacré, 1972).

L’œuvre de René Girard a en outre montré l’importance de la fonction du bouc émissaire dans toutes les sociétés humaines. Le rite du bouc émissaire consiste à purger le groupe social d’un mal (calamité, épidémie) en expulsant une figure victimaire désignée comme responsable et coupable afin de réaliser une purification (catharsis).

René Girard émet l’hypothèse d’un mécanisme intervenant dans l’émergence d’un ordre culturel et social : le mécanisme de la victime sacrificielle dont le sacrifice aurait la vertu d’apaiser le courroux des dieux (ou d’un dieu particulier), rétablissant ordre, tranquillité et concorde entre les uns et les autres. (Ex : faire lever les vents par le sacrifice d’Iphigénie par son père le roi Agamemnon lors de la guerre de Troie afin d’apaiser la colère d’Artémis, offensée par Agamemnon).

Girard considère la religion comme un moyen de régulation de la violence sociale, ainsi que de création de cohésion sociale et affirme qu’à travers le sacrifice, la violence qui menace la communauté est rituellement chassée, retournée vers l’extérieur plutôt que vers l’intérieur de la communauté et vers ses membres. Initialement, c’est dans l’Ancien Testament (Thora) que l’on trouve l’origine du rite du bouc émissaire. L’expression « bouc émissaire » provient de la traduction grecque de « bouc pour Azazel », un bouc portant sur lui tous les péchés d’Israël qui apparaît dans un passage du Lévitique.

Dans la Grèce antique, le pharmakos (φαρμακός), est « celui qu’on immole en expiation des fautes d’un autre », il désigne la victime expiatoire dans un rite de purification largement pratiqué dans les sociétés dites « archaïques ». Notons que c’est du mot « pharmakos » qu’est issu le mot « pharmakon » (drogue, médicament), remède ou poison selon la dose et l’usage. La filiation est donc évidente, il s’agit toujours d’une tentative de purification, la catharsis, séparation du bon et du mauvais qui conduit à la guérison.

Tout sacrifice remplit donc une fonction destinée à contenir et à expulser une violence fondamentale, inhérente à l’homme, une violence essentielle et de nature mimétique toujours selon René Girard.

Dès lors, comment ne pas voir ce qui est pourtant tellement visible aujourd’hui ?

L’essentiel n’étant pas de voir ce que tout le monde voit, mais de penser ce que personne n’a jamais pensé à propos de ce que tout le monde a vu.

Omicron semble fracturer l’équation sanitaire et toutes les mesures contraignantes et liberticides dans la mesure où ce dernier avatar viral ne semble pas plus virulent qu’un rhume de saison selon toutes les données disponibles depuis six semaines.

Dès lors, l’obligation du passe vaccinal deviendrait caduque dans cet espace sanitaire où circule un virus devenant majoritaire et très contagieux, mais demeurant inoffensif pour la grosse majorité de la population. Comment justifier de conditionner la vie des individus à un laissez-passer dans ces conditions ?  Et, comment justifier une ségrégation sociale et un statut particulier et discriminatoire pour les personnes non vaccinées ?

Cette épidémie omicron est surtout une épidémie de test, mais aussi une épidémie des personnes vaccinées, ce d’autant que depuis des mois, les non-vaccinés sont exclus de la vie sociale. Il suffit de consulter les cartes épidémiologiques pour s’en apercevoir.

La pression sur les populations non vaccinées relève du harcèlement moral, du chantage, de l’extorsion et de la maltraitance émotionnelle.

Cette pression exercée de manière perverse et même sadique (je vais « emmerder les non-vaccinés ») est potentiellement porteuse de violence. Mais attention, lorsque la pâte du tube de dentifrice est sortie, il est impossible de la remettre à l’intérieur.

La ségrégation et la stigmatisation des personnes qui refusent le vaccin et la dégradation de leur qualité de citoyen en font des parias de la société légitimement offensés et susceptibles de mettre leur colère en acte, les transformant en outre en cibles potentielles pour tous les thanatophobiques effrénés.

Les déclarations incendiaires des dirigeants français et belges sont par conséquent de nature à déclencher les forces les plus souterraines et les pulsions les plus les primaires dans une population déjà très éprouvée par deux années de tyrannie sanitaire totalement injustifiée.

La stratégie du bouc émissaire est un instrument de clivage politique vieux comme l’humanité. Le président Macron l’attise sciemment pour pouvoir fédérer sa majorité en désignant le mal, il assume de déclencher cette violence dans le registre du sacrifice. Si des violences se déclenchent à l’avenir, il pourra désigner le mal et procéder à un sacrifice cathartique en satisfaisant les instincts les plus primaires.

La violence mimétique du rite du bouc émissaire et ses pratiques sacrificielles nous rappellent avec force à quel point nous sommes encore et toujours gouvernés par l’inconscient collectif et l’inconscient individuel dans un monde en perdition qui a perdu tous ses repères fondamentaux, et ce malgré l’apparence trompeuse de son décor techno numérique.
Omicron est ce trou noir du Covide qui préfigure peut-être l’arrivée d’un cygne noir qui serait alors de nature à changer vraiment le cours des choses.

Omicron fracture, avale, aspire, éparpille, nettoie.

Accouchera-t-il d’un cygne noir ?

Michel Rosenzweig est philosophe et psychanalyste.

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