«On pouvait s’y attendre» : Bordeaux déçue de ne pas pouvoir accueillir le roi Charles III
La visite du couple royal a été reportée à la demande d’Emmanuel Macron au regard du contexte social lié à la réforme des retraites. La veille de l’annonce, les portes de l’hôtel de ville de Bordeaux ont notamment été incendiées.
La belle endormie s’est réveillée avec le sentiment d’une double peine vendredi. Alors que les portes de son hôtel de ville ont été incendiées par des opposants à la réforme des retraites jeudi soir, l’annonce est tombée comme un couperet, vendredi matin. La visite du roi Charles III, qui devait se rendre dans l’ancien duché d’Aquitaine avec la reine Camilla le 28 avril, a été annulée jusqu’à nouvel ordre. Le report de la visite de Charles III en France s’est fait à la demande de Macron, selon Downing Street.
«On pouvait s’y attendre quand on voyait la direction que ça prenait dans la rue», soupire Camille Meyrou, salarié au château Smith Haut Lafitte. Le souverain devait visiter le vignoble, classé grand cru exceptionnel depuis 1942. Après moult repérages par Buckingham Palace, de nombreux contacts avec les deux ambassades, des discussions avec les renseignements et un entretien avec le secrétaire privé du roi, les équipes du domaine choisi avaient été exaltées à l’idée de cette royale visite. «On est un peu triste», confie Florence Cathiard. «Il faut voir le verre à moitié plein comme dit mon mari : le château n’a jamais été aussi beau et fleuri», se console la copropriétaire des lieux.
Je n’osais même pas donner l’emplacement exact de la boutique où on devait recevoir le roi parce que j’avais peur que des manifestants la brûlent : Angèle Baillardran, Maison de canelés Baillardran. Amorcée en janvier et officiellement confirmée en février, la venue historique du couple avait été préparée en moins de six mois. Angèle Baillardran, qui s’est exercée à faire la révérence pour l’occasion, ne s’offusque pas de ce report. Tant pis s’il faut attendre et espérer encore un peu pour voir sa Majesté savourer les canelés de sa célèbre maison. «C’est une mesure de sécurité qui me semble tout à fait opportune. Je n’osais même pas donner l’emplacement exact de la boutique où on devait recevoir le roi parce que j’avais peur que des manifestants la brûlent. C’est affreux ce vandalisme», estime celle qui s’était promis de servir son thé «à la française» à la tête couronnée.
À la mairie de Bordeaux, exit également le tapis rouge, le café, la collation et l’accueil en petit comité des monarques avec 200 invités triés sur le volet, 150 enfants et l’orchestre social Démos. Pierre Hurmic, qui avait prévu d’accueillir le chef d’État et son épouse avec les égards républicains, sans baisemain ni révérence, la politesse n’est pas son fort, a exprimé la «déception» de Bordeaux et de ses habitants. L’édile qui s’apprêtait à recevoir «en toute sobriété radine» un écologiste de renom dont il admire «la sincérité et l’ancienneté de l’engagement», a assuré «regretter que notre pays n’ait pas été capable d’accueillir cette première visite d’État du Roi».